Les 620 pages du premier roman de Pauline Clavière (Laissez- nous la nuit, Grasset) constituent un document choc sur un lieu, véritable angle mort de nos sociétés : la prison. Max Nedelec, ex-imprimeur, y arrive parce qu’il a été un piètre gestionnaire de son entreprise. Ce qu’il va voir, entendre, découvrir et subir dans les douches ou la cour de la centrale est raconté avec une force documentaire et un style impressionnants de maitrise. La fréquentation de Gino ou de Françoise Rosier, avocats commis d’office ou médecin de la prison, du Serbe ou de Tortilla ou de Marcos Ferreira, codétenus, suggèrent que l’humanité peut perdurer et continuer de couler, comme un petit ruisseau, dans des endroits clos, inhumains et si proches de nous. Le roman, disait Stendhal, « c’est un miroir qu’on promène le long d’un chemin ». Sans aucun doute, Pauline Clavière est romancière. Il y avait La chanson de légende, Retiens la nuit, on a désormais Le roman Laissez-nous la nuit.